Les mécanismes sous-jacents de la violence conjugale sont souvent subtils et difficiles à identifier pour la victime, prisonnière de cette spirale. Entre des phases de calme apparent, fréquemment appelées « lune de miel », et des épisodes de violence intense, il devient ardu de percevoir clairement la réalité de cette dynamique instable.
On parle ainsi souvent de cycle de la violence conjugale pour décrire la dynamique répétitive et progressive qui s’installe dans les relations abusives.
À chaque étape, la violence et le contrôle se manifestent de manière distincte.
On pourrait penser que les manifestations les plus évidentes de la violence ne surviennent que lors des crises, où elles sont à leur paroxysme. Pourtant, la violence psychologique atteint des sommets pendant les phases de rémission, où manipulation, déni et fausses promesses sont monnaie courante. Quant à la phase de tension, elle est marquée par un contrôle coercitif, exercé subtilement à travers des micro-régulations du quotidien et des restrictions de liberté.
Chacune de ces phases contribue à renforcer l’emprise de l’agresseur sur sa victime, ne lui laissant aucun répit.
Ce cycle est généralement composé de quatre phases :
1 – Tension croissante : des tensions s’accumulent dans la relation, souvent déclenchées par des frustrations ou des conflits mineurs. La victime ressent une pression, une inquiétude, et parfois essaie de « marcher sur des œufs » pour éviter d’aggraver la situation. la violence se fait plus subtile mais tout aussi oppressive. La victime, plongée dans un état d’anxiété permanent, tente désespérément de maintenir la paix, sans se rendre compte qu’elle perd peu à peu son pouvoir sur la situation.
2 – Explosion de la violence : une crise survient, marquée par des actes de violence, qu’ils soient physiques, verbaux, sexuels, ou psychologiques. C’est la phase la plus visible du cycle où la tension accumulée explose sous forme de comportement violent. La crise, ou l’agression, se produit généralement quand la victime tente d’exercer du pouvoir sur une décision ou sur sa vie, et que l’agresseur utilise de la violence pour «gagner» et imposer sa volonté. Peu importe la forme que prend la violence (psychologique, verbale, physique, sexuelle…), elle a de grandes répercussions.
La victime a peur, elle a mal, elle est blessée et elle ne comprend pas pourquoi son partenaire réagit aussi brusquement, pourquoi il va aussi loin, comment la situation a pu «dégénérer» à ce point. Elle se sent impuissante, puisque ses efforts pour apaiser sa/son partenaire ne fonctionnent pas.
C’est souvent lors des crises que la victime risque d’utiliser des comportements de violence réactionnelle pour se défendre ou pour tenter de retrouver son pouvoir légitime sur la situation. Après la crise, la victime est déstabilisée et il est possible qu’elle remette en question les comportements de sa/son partenaire ou même la relation. La phase de crise/agression éclate généralement lorsque la victime tente de s’affirmer ou de prendre des décisions autonomes, provoquant ainsi la réaction violente de l’agresseur.
Peu importe la forme qu’elle prend, qu’elle soit verbale, psychologique ou physique, la violence laisse des cicatrices profondes. La victime se retrouve alors désemparée, blessée, et incapable de comprendre l’ampleur de la réaction de sa/son partenaire.
3 – Justifications et excuses : après l’acte de violence, l’auteur peut exprimer des remords, minimiser les faits, ou blâmer la victime, voire promettre de changer. Ces justifications peuvent créer chez la victime de la confusion, voire un espoir de retour à une situation plus stable en pensant que sa/son partenaire ne l’a pas fait souffrir volontairement.
4 – Phase de « lune de miel » ou de réconciliation : ici, l’auteur de la violence se montre souvent très aimant et attentionné. Cette phase tend à brouiller la perception de la victime. En parallèle, l’agresseur va minimiser très souvent ses actions passées, tentant même de faire porter à la victime une part de responsabilité dans les événements. Voire à faire du chantage au suicide.
Et lorsque finalement la victime ose réaffirmer son autonomie, le cycle recommence inexorablement.
en effet, ce cycle tend à se répéter et à s’aggraver au fil du temps, la phase de « lune de miel » ou de réconciliation diminuant peu à peu jusqu’à disparaître, tandis que la violence devient plus fréquente et intense.
Ce cycle enferme la victime dans une relation marquée par la peur, la dépendance émotionnelle, et la difficulté à quitter la situation abusive.
Nous vous invitons aussi à consulter la brochure d’information sur « le Violentomètre ». Cet outil de sensibilisation aux violences conjugales permet de « mesurer » si sa relation amoureuse est basée sur le consentement et ne comporte pas de violences. Il est téléchargeable en ligne.
Pour aller plus loin :
Le cycle des violences conjugales est un concept clé pour comprendre la dynamique des relations abusives. Plusieurs ouvrages et articles approfondissent ce sujet :
- « Les violences conjugales » par Liliane Daligand. Cet ouvrage offre une analyse détaillée des mécanismes des violences au sein du couple, y compris le cycle de la violence. L’auteure, psychiatre et expert judiciaire, propose des pistes pour rompre ce cycle destructeur. Cairn.info
- « Le cycle de la violence conjugale, c’est quoi ? » par France Victimes Cet article explique les différentes phases du cycle de la violence conjugale et fournit des conseils pour les identifier et les interrompre. France Victimes
- « La mécanique des violences conjugales : cycle de la violence, emprise… » par Déclic Violence Ce document explore en profondeur le cycle de la violence et l’emprise exercée par l’agresseur, offrant des outils pour mieux comprendre et intervenir. Declic Violence
- « Les violences conjugales » dans la revue Empan Ce numéro propose de définir ce que sont les violences conjugales, d’essayer de comprendre comment elles se produisent et se reproduisent, et de les saisir dans plusieurs de leurs dimensions : individuelles et collectives, professionnelles et citoyennes. Cairn.info
- « Les violences conjugales : pour une clinique du réel » dans la revue Thérapie Familiale Cet article aborde les différentes approches théoriques de la prise en charge des situations de violences conjugales, y compris le cycle de la violence. (Cairn.info)
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